Surplombant la vallée du Grésivaudan, sur l’axe de communication Grenoble-Chambéry, Belledonne est une montagne à étages. L’agriculture occupe l’espace des balcons, collines bordières qui assurent la transition entre la vallée urbanisée et les haut sommets, à des altitudes allant de 400 m à 1100 m environ. Les surfaces sont en grande majorité herbagères.
L’agriculture est soumise à d’importantes contraintes : les pentes sont fortes et seuls 50% des terrains sont mécanisables, le travail a une productivité faible, les déplacements sont difficiles, les parcellaires sont morcelés. De plus, la proximité des agglomérations induit une forte pression résidentielle et touristique, et donc une complexité dans le partage de l’espace entre utilisateurs.
Mais l’influence périurbaine se traduit aussi par un grand bassin de consommation de presque 100 000 habitants sur Belledonne et la vallée du Grésivaudan, et une fréquentation touristique soutenue, ce qui représente un atout considérable pour la vente des produits agricoles et l’agritourisme.
CHIFFRES CLés
L’agriculture de Belledonne mêle des spécificités de montagne, en situation péri-urbaine.
Sur le total d’exploitants, 47% sont à temps plein, 38% sont double-actifs et 15% sont retraités (ADABEL, 2009).
85 % des exploitations sont orientées sur l’élevage, bovin viande principalement, mais aussi bovin lait, ovin et caprin.
Globalement, le Recensement Général Agricole 2010 recense 267 équivalents temps plein.
Les bovins et ovins passent 6 à 8 mois de l’année en étable, sortent sur les coteaux pentus en intersaison, et pour la plupart, montent en alpage l’été. Les quelques parcelles mécanisables sur les secteurs plus plats sont stratégiques pour la production des fourrages d’hiver, essentiellement du foin.
En plus des produits d’élevage dominant (viande bovine, ovine et lait), une petite quinzaine d’exploitations assurent une diversification : céréales avec transformation en pain sur le sud du massif, production de miel, de volailles de chair, d’œufs fermiers, de légumes, de viande porcine, entre autres.
Un tiers des exploitations sont des exploitations d’élevage tournées sur des filières de vente longues. De dimension petite à moyenne, ces exploitations ont souvent des problèmes de rentabilité économique. Pour plus de la moitié des exploitants, il s’agit d’une double-activité qui leur dégage un complément de revenu.
Un autre tiers des exploitations (élevage et la totalité des autres productions), se sont tournées complètement ou en partie sur la transformation et/ou la vente directe (production dite « fermière »). Elles répondent à la forte demande des résidents et des touristes en produits locaux de qualité, et misent sur la création de valeur ajoutée : transformation de lait en fromage, découpe de viande, etc. Certaines participent à la vie touristique du massif (gîte, auberge…).
Enfin, il y a 30% d’exploitations patrimoniales, dont la logique est l’entretien de propriétés familiales, sans stratégie économique marquée. Les agriculteurs qui souhaitent vivre de leur métier ont du mal à accéder au foncier qu’elles mobilisent, qui reste dans cette sphère affective ou spéculative.
Au XIXème siècle, à l’image de l’agriculture française, Belledonne fait vivre de très nombreuses petites exploitations familiales de polyculture-élevage. Déjà, beaucoup de paysans pratiquent des activités artisanales complémentaires : horlogerie, ganterie, tissage…
Dès la fin du XIXème siècle, la plaine du Grésivaudan connait un fort essor industriel : de nombreuses usines s’implantent (papeteries, mines, usines d’hydroélectricité) et recrutent de la main d’œuvre en montagne. C’est ainsi que nait sur Belledonne une catégorie professionnelle : « l’ouvrier-paysan ». Plus tard, avec l’arrivée des stations de sports d’hiver, la saisonnalité des emplois permet de faire durer ce système de double-activité ou pluri-activité des agriculteurs jusqu’à aujourd’hui.
Mais d’autres paysans quittent aussi définitivement l’activité agricole. Et conformément à la dynamique globale en France, le nombre d’exploitations diminue. En phase avec la dernière révolution agricole, celles qui demeurent se mécanisent, se spécialisent. Mais leur agrandissement est freiné par la permanence de ces générations d’agriculteurs double-actifs, qui ne vivent pas exclusivement de leur activité agricole, mais qui ne lâchent pas pour autant leur ferme familiale. En conséquence, les espaces les moins accessibles sont peu à peu abandonnés, et les agriculteurs qui restent se réservent les parcelles de proximité.
Les fermes demeurent donc de petite taille (13,9 ha en moyenne en 1988), et peu productives. Les double-actifs investissent un peu sur leurs fermes, en matériel notamment, avec leur salaire extérieur, mais moins sur des aspects techniques comme la génétique, ou sur la modernisation des bâtiments.
Ces double-actifs ont abandonné progressivement la production laitière pour l’élevage de mère allaitantes, plus compatible avec la double-activité. Ainsi, la production laitière a fortement diminuée sur Belledonne.
Aujourd’hui, il reste une dizaine d’exploitations laitières, contre plus de 300 en 1985.
La moitié d’entre elles se sont tournées sur la transformation et la vente directe (550 000 litres de lait par an sont transformés en vendus en fromage sur Belledonne). Sept d’entre elles dépendent de la collecte laitière, réalisée aujourd’hui par la coopérative SODIAAL Union, pour 1 million de litres livrés par an.
Tant qu’elle est là, l’agriculture fait partie du paysage. Elle rattache au passé, aux valeurs « traditionnelles ». Ce n’est que quand le décor se détériore, que la broussaille gagne du terrain, qu’on comprend que le paysage qu’on pensait immuable est le résultat d’un travail. Et que ce travail dépend de son assise foncière, bien fragile…
Ainsi, la production laitière a fortement diminuée sur Belledonne.
Aujourd’hui, il reste une dizaine d’exploitations laitières, contre plus de 300 en 1985 :
La moitié d’entre elles se sont tournées sur la transformation et la vente directe (550 000 litres de lait par an sont transformés en vendus en fromage sur Belledonne). Sept d’entre elles dépendent de la collecte laitière, réalisée aujourd’hui par la coopérative SODIAAL Union, pour 1 million de litres livrés par an.
Tant qu’elle est là, l’agriculture fait partie du paysage. Elle rattache au passé, aux valeurs « traditionnelles ». Ce n’est que quand le décor se détériore, que la broussaille gagne du terrain, qu’on comprend que le paysage qu’on pensait immuable est le résultat d’un travail. Et que ce travail dépend de son assise foncière, bien fragile…
Préserver l’assise foncière de l’agriculture, c’est d’abord préserver les espaces agricoles stratégiques : les quelques terrains labourables cultivés en céréales, les terrains mécanisables utilisés en prairies de fauche et les pâtures de proximité pour les troupeaux laitiers.
Or, sur l’ensemble du massif, ces terrains labourables ou mécanisables sont rares !
Sur les contreforts du massif, seulement 1,7% de terres labourables et 38% de terres mécanisables !
Or, ce sont ces mêmes surfaces plates qui sont prisées par l’essor de l’urbanisation. Témoin de la pression résidentielle qui s’exerce sur l’espace agricole, la population de l’ensemble des communes de Belledonne a fortement augmenté : elle est passée de 19 846 habitants en 1990, à 24 096 habitants en 1999, puis à 27 255 habitants en 2006.
Les conséquences directes sont :
Cette spéculation fragilise fortement l’activité agricole, en précarisant son foncier : les familles qui abandonnent l’agriculture gardent leurs terres ; celles-ci se divisent au fil des successions. Les agriculteurs qui restent deviennent dépendant de multiples locations, et celles-ci sont de moins en moins formalisées. Ainsi, en moyenne un agriculteur a 70% de ses terres en location, et parmi elles, la grande majorité sont verbales (hors statut du fermage). L’agriculteur peut donc perdre un terrain à tout moment.
Les agriculteurs ont des difficultés à entretenir les parcelles les plus éloignées, les plus difficiles d’accès, les plus pentues (manque de matériel adapté, de main d’œuvre). Souvent, l’entretien de la parcelle est plus couteux que le revenu agricole qu’elle génère. Par ailleurs, certaines propriétés dans des secteurs de coteaux ne sont plus relouées au fil des successions, des transmissions. La multitude de propriétaires dans certaines zones ne facilite pas les liens avec les agriculteurs. Pour de multiples raisons, la friche gagne certains secteurs, et rapidement. Après 2-3 ans de friche, inverser le phénomène et récupérer la parcelle demande un travail coûteux.